Tennis, France, Finances : Roland-Garros quoi !
En ce début de semaine férié débutait, pour le plus grand bonheur des amateurs de tennis, le tournoi des Internationaux de France, mieux connu sous le nom du célèbre aviateur : Roland-Garros. Du 25 mai au 7 juin, les meilleurs joueurs mondiaux s’affronteront dans le deuxième des quatre tournois du Grand Chelem de l’année (après l’Open d’Australie qui a eu lieu en janvier, Wimbledon fin juin/début juillet et l’US Open en août). Dans le monde, le tournoi est plus connu sous le nom de French Open. Nous profitons de cet évènement pour non pas parler des matchs qui se déroulent sur le court, mais de ceux qui ont lieu en dehors.
Chaque année c’est l’effervescence Porte d’Auteuil. Le tournoi attire la foule en masse et surtout les entreprises qui souhaitent associer leur nom à l’une des manifestations de tennis les plus populaires dans un pays où le tennis est aussi important socialement qu’économiquement. Deuxième sport le plus populaire en France, derrière l’indétrônable football mais devant l’équitation ou le judo, le tennis français se distingue au niveau européen puisque l’on y recense un peu plus de 20% des pratiquants, pour 18% des courts situés sur le territoire français, soit juste derrière les voisins Allemands. Une machine bien huilée, mais « Roland-Garros dépendante ».
En 2013, selon une étude menée sur demande de la Fédération Française de Tennis (FFT), ce sport employait 28.000 personnes dans l’hexagone, permettant ainsi aux 1.1 millions de licenciés de pratiquer leur sport. Les pratiquants non licenciés sont environ 3 fois plus nombreux. Niveau économique, ce sont 2.2 milliards d’euros de chiffre d’affaires pour 116 millions d’euros de recettes fiscales. Ce développement national est rendu possible grâce au développement d’une manifestation, vous l’aurez compris : Roland-Garros.
Depuis le milieu des années 70, la FFT finance les divers comités départementaux et permet ainsi d’assurer le bon développement du tennis en France et de conserver les emplois liés à ce sport. La pratique amateur représente à elle seule pas moins de 12.000 emplois et reçoit annuellement 36 millions d’euros de subventions, de la part de la FFT. Sans les recettes générées par Roland-Garros, il serait impossible pour la FFT de continuer à financer de la sorte le tennis français tout en maintenant ses comptes dans le vert. Cette compétition est donc bien plus qu’une manifestation sportive, c’est un coup d’œil, voire un coup de pouce, à la santé financière du tennis en France. La fréquentation de Roland-Garros est passée de 100.000 personnes il y a 30 ans, à 300.000 il y a 20 ans pour atteindre plus de 450.000 aujourd’hui. Sur ce point, des travaux d’agrandissement sont prévus (pour un coût avoisinant les 340 millions d’euros) mais le dossier coince. Pourtant avec des places pouvant atteindre 175 euros, le calcul est vite fait.
L’étude nous montre que sans Roland-Garros, l’excédent brut d’exploitation ou EBE (soit les ressources après paiement des charges et avant amortissement) du tennis français en prendrait un sacré coup. A titre d’exemple, sur l’année 2012, l’EBE passerait de +16 millions d’euros à -61 millions d’euros. Avec l’agrandissement de Roland-Garros, la manifestation permettrait d’injecter 40 millions d’euros en plus par an d’ici 2030. Soit un amortissement des travaux en moins de 9 ans. L’an dernier, le tournoi Porte d’Auteuil a généré 289 millions d’euros de PIB qui ont profité à la ville de Paris à hauteur de 277 millions d’euros.
Le talon d’Achille du tournoi ce sont les droits TV. La FFT peine à vendre à leur juste valeur ces droits, malgré son importance dans le paysage français. Ainsi, ils sont en moyenne 2 à 2.5 fois moins élevés que ceux de Wimbledon ou de l’US Open. Pourtant, avec plus de 3 milliards de téléspectateurs dans le monde, le revenus TV génèreraient plus de 60 millions d’euros, dont près du tiers à la charge de France Télévision. Au final, les revenus sont importants puisque la publicité est omniprésente, et les arrêts de jeu, plus fréquents qu’au football, permettent de glisser plus souvent des spots publicitaires très courts.
Cette année, dans les couloirs de la Porte d’Auteuil, l’Italie a pris l’ascendant sur la Suisse. En effet, il ne sera plus possible, après 10 ans de collaboration, de boire du café Nespresso (appartenant au Suisse Nestlé), mais du Lavazza. Giuseppe Lavazza, le vice-président du groupe, a paraphé en avril dernier un contrat le liant au tournoi pour une durée de 3 ans. Déjà présent depuis 5 ans à Wimbledon, Lavazza le sera cette année pour la première fois à l’US Open. Il ne lui manque plus qu’à batailler pour obtenir l’Open d’Australie, et ça sera le Grand Chelem ! Pour son entrée sur terre battue en France, le groupe compte bien pulvériser le record de son rival, en vendant 900.000 cafés lors de la compétition (soit deux fois plus que Nespresso). Un pari osé, mais qui développerait fortement son image dans l’hexagone, alors que se murmure le rachat de Carte Noire par Lavazza, ce qui propulserait ce dernier dans le fauteuil de lea der en France. Mais c’est une autre histoire.
On constate que le tennis est le sport individuel en vogue en France. Les retombées continuent de croître et les partenaires avec. Malgré quelques points d’ombre, Roland-Garros est bien loin d’avoir dit son dernier mot, reste à ce que le spectacle soit au rendez-vous, et pour cela on compte uniquement sur les joueurs.
Manuel Orengo
Economie et Sport – Kazeco.com